Black-out #2 : 1er janvier 2022

1^er janvier 2022.

Immédiatement, Kyuu s’était précipité vers son frère, qui demeurait inconscient. Il s’empressa de l’amener à l’hôpital le plus proche. Le voyage s’était montré difficile et éprouvant. L’aîné avait dû affronter le chaos qui régnait encore dans la ville de Koyama en cette effroyable nuit du Nouvel An. Il avait décidé de porter Roku sur son dos, n’ayant aucun autre moyen pour le transporter. Heureusement, le cadet était assez léger. De temps en temps, Kyuu posait son frère au sol et tentait de la ranimer. Sans succès. Il éprouvait également beaucoup de peine à garder son calme. Son frère était tout ce qu’il lui restait, après le décès de leurs parents. Les jumeaux avaient été placés en foyer, mais ne forgeaient que peu de relations avec les autres enfants et adolescents. Ils avaient même réussi à négocier leur chambre privée. Quoi qu’il puisse arriver, Kyuu se jura à lui-même de sauver son frère.

L’aîné arriva en vue d’un des nombreux hôpitaux de la ville de Koyama. Celui-ci était de taille moyenne, mais il y régnait une grave agitation. Les émeutes et autres violences qui avaient éclaté avaient causé un grand nombre de blessés. Kyuu pénétra dans le hall d’entrée, et s’adressa à l’accueil, presque en pleurs :

– Mon frère s’est évanoui… Aidez-le, s’il vous plait !

L’infirmière appela directement un médecin, et tenta de calmer Kyuu, ce qui fut difficile. Finalement, Roku fut rapidement pris en charge par le service des urgences. On demanda à Kyuu de patienter un moment dans une des salles d’attente proches de l’entrée, le temps que Roku puisse recevoir des soins.

Le temps semblait long. Kyuu observait les va-et-vient du service des urgences. De nombreuses personnes blessées entraient. Leurs proches stationnaient là. Après un moment, le bruit de l’agitation sonnait comme un simple brouhaha dans les oreilles de Kyuu. Il finit par se retrouver perdu dans ses pensées. Qu’était-il donc arrivé ? Ces dernières heures restaient incompréhensibles. Visiblement, l’humanité entière avait subi un black-out d’une année. Et pourtant, tout le monde semblait avoir continué à tourner. Les smartphones étaient encore chargés, les bâtiments restaient encore en service. Ces évènements n’avaient aucune logique. Et puis, qu’était-il arrivé à Roku ? Bien que de constitution relativement faible, le jeune homme était en bonne santé. Pourquoi s’était-il évanoui subitement ? Entre-temps, pris de panique, la population continuait de s’embraser dehors. La ville devenait incontrôlable, comme si tous les citoyens étaient subitement pris d’une terrible folie.

Kyuu fut subitement sorti de ses pensées par l’arrivée d’une nouvelle infirmière. On l’informa que Roku avait été placé dans une chambre, et restait en observation pendant un moment. Kyuu put finalement le rejoindre. Alors qu’il arrivait dans la chambre, il vit son frère allongé dans un lit blanc, froid et austère, et il était toujours inanimé. Un médecin entra ensuite dans la chambre.

– Vous devez être le frère du patient, je suppose ?
– Oui, répondit simplement Kyuu.
– Vous n’avez pas de parents, ou de tuteurs ?

Kyuu l’informa alors qu’ils vivaient en foyer. « Je suis la seule famille qu’il lui reste. », ajouta-t-il. Le médecin entreprit donc de lui donner les explications sur l’état de Roku. Tous avaient relevé une chose étrange : les variables de Roku étaient toutes parfaites. En gros, le cadet était en parfaite santé. Les médecins ne parvenaient pas à expliquer pourquoi Roku restait inconscient.

– C’est pourquoi nous préférons le garder en observation.

Kyuu acquiesça. Il posa un regard triste vers son frère, et parcourut la chambre du regard. Puis, il s’adressa au médecin.

– J’aurai quelque chose à vous demander…
– Allez-y.
– Est-ce que je pourrais… – Kyuu marqua une hésitation – « rester avec lui ? »

Le médecin se retourna vers l’infirmière.

– Je n’ai que lui. Je me sentirai bien mieux si je peux rester à ses côtés.

L’homme était frappé par le désespoir de son interlocuteur. Le regard de Kyuu était cependant empli de détermination. Il n’abandonnerait en aucun cas son frère.

– Bien. Je vais voir ce que je peux faire. Mais partez du principe que c’est bon. Vous pouvez rester ici.
– Merci.

Finalement, Kyuu passa la nuit aux côtés de son frère. « Passer la nuit » était la bonne expression, il ne parvenait pas à fermer l’œil. Il passait son temps à fixer Roku, ou à jeter un regard vers l’extérieur et à la ville enragée. De temps en temps, il tenait – vainement – de réveiller Roku.

L’année 2022 venait de commencer, et le monde ne tournerait jamais plus comme avant.

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La suite : #3